Utilisation de la Toxine Botulique dans le traitement des strabismes et paralysies oculomotrices de l’adulte et de l’enfant.

Vous même ou votre enfant présentez un strabisme ou une paralysie oculomotrice pour lesquels votre ophtalmologiste vous propose un traitement par injection de Toxine Botulique dans les muscles oculomoteurs. Cette fiche contient l’information sur l’intervention proposée, ses résultats et ses risques.

Généralités sur la toxine botulique et ses règles d’utilisation :

La Toxine Botulique est sécrétée par une bactérie et lyophilisée. Son usage pharmacologique dans le traitement des strabismes et paralysies oculomotrices à débuté aux USA, dans les années 1970. Les doses utilisées sont infimes et ne provoquent aucune réaction générale apparentée à la maladie du botulisme. Son usage s’est considérablement répandu dans le traitement des troubles oculomoteurs et des dizaines de milliers de patient ont déjà été traités, notamment en Amérique du Nord mais aussi en Europe, surtout en Angleterre et Espagne. En France, l’usage n’est pas encore très répandu, notamment en raison de problèmes administratifs et de l’absence de prise en charge du produit par les caisses d’assurance maladie. L’AMM (autorisation de mise sur le marché) délivrée par le ministère de la santé ne recouvre en France que les troubles oculomoteurs après l’âge de 12 ans. Pourtant, le produit est couramment utilisé dans les autres pays dès la première année de vie, depuis plus de 20 ans. Les résultats ont fait l’objet de nombreuses communications scientifiques attestant son efficacité et son innocuité sur le plan général, même chez le jeune enfant.

L’utilisation en France est donc soumise à certaines règles. L’ophtalmologiste pratiquant l’injection doit être spécialisé en strabologie et avoir reçu une formation spécifique validée par un certificat. Le geste doit être réalisé en centre hospitalier ou en clinique chirurgicale, dans un environnement chirurgical. Le patient doit recevoir une information adéquate. Si l’injection est proposée hors AMM, notamment chez l’enfant avant 12 ans, les parents doivent délivrer une autorisation spécifique.

Action de la toxine botulique :  Injectée dans un muscle, elle le paralyse, mais de manière réversible. L’effet se manifeste progressivement en quelques jours, est maximale en 8 jours et diminue progressivement pour disparaître en 2 à 4 mois.

Technique opératoire :  Dans un strabisme commun, la toxine est injectée sous microscope opératoire dans le ou les muscles hyperactifs. L’intervention est réalisée sous anesthésie de contact, parfois aidée d’une brève anesthésie générale chez l’adulte, le plus souvent en secteur ambulatoire. Chez l’enfant, le geste est réalisé sous anesthésie générale brève. Le geste est beaucoup moins agressif qu’une intervention classique de strabisme, l’injection peut même être réalisée sans aucune ouverture, au travers de la conjonctive.

Résultats : L’œil dévié va donc se recentrer. La réduction du strabisme peut être définitive, partielle ou totale ; parfois, le strabisme peut récidiver au bout de quelques mois.

Evolution postopératoire : L’effet est progressif sur 8 jours et va diminuer ensuite sur 2 à 4 mois. On assiste donc à un état qui varie d’une semaine sur l’autre jusqu’à stabilisation. Une surveillance notamment orthoptique est nécessaire de manière hebdomadaire chez le jeune enfant, afin de dépister toute modification visuelle pendant cette phase instable. Une surcorrection est fréquente, souhaitable (divergence s’il s’agissait d’un strabisme convergent), et réversible.

En cas d’efficacité satisfaisante mais régressant en quelques mois, une réinjection peut être proposée, en général plus de 4 mois après la première injection.

En cas d’inefficacité, la chirurgie musculaire est en général la seule alternative de traitement.

La chirurgie réalisée après injection est réalisée sur des muscles sains et donc dans des conditions plus simples que lors d’une réintervention.

Complications :

  • Locales : hémorragies sous conjonctivales simples sans gravité. La perforation de l’œil lors de l’injection est rarissime car le geste est réalisé sous contrôle visuel strict ou electromyographique.
  • Générales : aucune manifestation toxique spécifique du produit n’a jusqu’à présent été rapportée. Quelques cas d’allergie, non spécifiques peuvent être observés et traités de manière adéquate.
  • Musculaires : le produit peut diffuser aux muscles voisins et provoquer une paralysie involontaire d’autres muscles de l’œil responsable le plus souvent de déviations verticales, d’un ptosis (chute de la paupière). Ces troubles, assez fréquents, sont impressionnants mais toujours régressifs et sans conséquences si une surveillance et un traitement adéquat sont institué. Dans quelques cas, le ptosis peut provoquer ou aggraver chez le jeune enfant une amblyopie (baisse de vision) vite dépistée et traitée facilement.

En résumé : La toxine botulique est un traitement physique peu agressif des désordres oculomoteurs (strabismes, paralysies oculomotrices). Au prix d’un geste réalisé sous anesthésie légère, peu agressif pour les muscles, elle permet de traiter définitivement plus de 50% des strabismes. Elle améliore le confort de vision en ramenant la zone de vision simple plus près du centre dans les paralysies. Elle n’empêche aucunement une éventuelle chirurgie ultérieure, voire même la facilite en évitant les rétractions musculaires. Les inconvénients les plus importants sont l’instabilité de la déviation durant les mois suivant l’injection, rendant nécessaire une surveillance étroite, notamment chez le jeune enfant.